
Quels sont les facteurs de stress à l’école pour un∙e élève autiste et comment l’en prémunir ?
Organisé par autisme suisse romande
Cours d’approfondissement
Pour suivre ce cours, il est nécessaire d’avoir suivi un cours de formation théorique en autisme.
- Intervenante
- Marie-Jeanne Accietto
- Contenu
- Lorsque nous percevons quelque chose de stressant, il s’ensuit une cascade d’événements biologiques provoquant la sécrétion d’hormones du stress, telles que l’adrénaline et le cortisol. Tout ce qui cause la production d’hormones du stress est par définition un stresseur. Il en existe deux grandes catégories : stresseurs physiques et stresseurs psychologiques. Il y a de nombreux ingrédients du stress, comme se sentir menacé, avoir un contrôle faible sur une situation, être confronté à de l’imprévisibilité ou à de la nouveauté (quelque chose qu’on n’a jamais expérimenté) ou encore se sentir personnellement mis à l’épreuve, jusqu’à nous pousser à douter de nos propres compétences.
Les élèves autistes se sentent souvent stressé∙es à l’école ce qui engendre de l’anxiété, plus ou moins grave. Cette même anxiété explique aussi en partie les épisodes d’« effondrements autistiques » (meltdown/shutdown), auxquels ils et elles sont parfois confronté∙es. Dans le cadre de cette formation, nous allons nous intéresser aux stratégies et outils à mettre en place pour limiter les sources de stress qui sont la plupart du temps considérées par les personnes non-autistes comme anodines. Et c’est précisément, dans cet interstice de « l’anodin » que se cache la différence de stresseurs entre l’élève autiste et l’élève non-autiste. C’est dans la connaissance du fonctionnement autistique qu’on trouve la clé pour aménager à sa juste mesure l’environnement, ce qui est un facteur de protection majeur.
- Public concerné
- Toute personne, autiste, parent ou professionnelle de l’éducation.
- Date/durée
- 16 mars 2024 / 1 jour
- Délai d’inscription
- 23 février 2024
Inscription:

Lettre ouverte à mon copain, André
Cher ami,
Je suis désolé d’apprendre que tu es victime de moqueries et que tes professeurs ne te comprennent pas. Je suis également un adolescent autiste, j’ai donc une idée de ce que tu peux ressentir. Moi, j’ai beaucoup travaillé avec ma famille et ma psy sur mes émotions et celles des autres. C’est un autre univers.
Mais, je veux te dire que tu n’es pas seul. Il y a beaucoup de jeunes comme nous qui ont des difficultés à s’adapter au monde qui les entoure. Pour ma part, je ressens souvent une grande anxiété en présence de nouvelles personnes ou de situations inconnues. C’est pourquoi je préfère souvent me concentrer sur mes intérêts spécifiques, qui me procurent un sentiment de réconfort et de sécurité.
Malheureusement, je sais que cela peut souvent susciter des moqueries de la part de mes camarades. S’intéresser à Winnie l’ourson à 15 ans, ça le fait pas. Je suis souvent étiqueté comme bizarre ou différent. Je le suis, et alors ? Je veux que tu saches que ta différence est quelque chose de spécial et de beau, même si cela ne peut pas être compris par tout le monde : ça je l’ai compris peu à peu, grâce au travail que j’ai fait pour mieux me comprendre aussi.
Quant à tes professeurs, je sais à quel point il peut être difficile de communiquer avec eux. Pour ma part, j’ai souvent du mal à exprimer mes émotions et mes besoins de manière claire et directe. Et puis, ils sont toujours pressés, stressés et me répètent à tout bout de champ que je dois être autonome, à mon grand âge. Mais toi, tu connais des ados autonomes à 15 ans ? Ils mentent. Je dois dire que j’apprécie lorsqu’ils utilisent les supports visuels ou les scénarios pour m’aider à comprendre les différentes émotions et situations. Là vraiment, je me sens compris.
Je tiens à te rappeler que tu mérites d’être respecté et aimé pour qui tu es. Les difficultés que nous rencontrons ne nous définissent pas. Nous avons tous nos forces et nos faiblesses, et c’est cela qui fait de nous des êtres humains uniques et précieux.
Je te souhaite tout le courage et la force dont tu as besoin pour faire face à tes défis. N’oublie pas que tu es capable de réaliser de grandes choses et que tu mérites d’être heureux.
Jacques
PS: Merci Jacques de m’avoir permis de publier ta lettre. Merci André d’avoir autorisé ce témoignage.
Je précise que les noms et les images sont d’emprunts.
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Simone aime Yoda
Aujourd’hui je vais vous présenter Simone. Simone est une petite fille de 10 ans, qui va à l’école de son quartier. Elle adore les chats. C’est sa passion.
En arrivant à l’école, faisant fi du surveillant et des autres élèves, elle court tout de suite vers Marie, sa meilleure amie, sa seule vraie amie en fait, et elle lui parle de son chat.
Lorsqu’elle décrit les facéties du jour de son Yoda (c’est le nom de son chat), Simone a vraiment du plaisir. Elle décrit tout avec précision : comment il se lèche les babines après avoir mangé ses 16 croquettes, comment il tortille ses moustaches avec sa patte droite avant et comment il se glisse sous la couette en plissant ses yeux, ce qui lui donne un regard enjôleur, etc. Tous les détails y sont.
Marie l’écoute, même si elle connaît déjà cette histoire que Simone lui raconte tous les matin au mot près. Au bout de quelques minutes, toutefois, Marie commence à bâiller, à essayer d’entraîner Simone vers le groupe des autres filles, à regarder sa montre, mais rien n’y fait… Simone, plongée dans son histoire, continue le récit des aventures de son Yoda.
Marie, alors, finit par prétexter qu’elle doit parler à une autre camarade et part sans attendre. Elle rejoint en réalité le groupe des autres filles qui sont en train de « se raconter des histoires ».
Simone ne comprend pas bien le départ abrupt de Marie, et finit par la rejoindre. Elle essaie de suivre les échanges des autres filles, mais c’est compliqué. Tout va très vite et en plus, elle n’y voit franchement aucun intérêt. Elle trouve même tout cela très enfantin. Pourquoi parler des beaux yeux de Luc et du dernier sac à main acheté par Lucie avec sa grand-mère qui a épousé en secondes noces un riche acteur du Sud de la France ? Aucun sens. Mais Simone voit que toutes les autres filles trouvent ça génial …. Alors elle ne dit rien : elle veut faire partie du groupe. Elle regarde Marie et essaie de faire tout comme elle….
Elle se dit que c’est sûrement elle qui a un problème, puisque toutes les autres filles trouvent ça si hyper intéressant.
La cloche retentit. Tout le monde se met en rang. Simone aussi, mais elle est déjà un peu fatiguée.
Elle pense à Yoda et cela lui fait du bien.
Pourquoi Simone se sent déjà fatiguée ?
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André, mon élève est anxieux
Dans notre quotidien d’enseignant.e. spécialisé.e, il nous arrive régulièrement d’être confronté.e à des élèves anxieux.
L’anxiété est une co-occurrence assez fréquente chez les élèves autistes et cela peut déboucher parfois sur des situations de crise plus ou moins importantes.
Il y a plusieurs facteurs qui peuvent générer ces crises et les personnes autistes en témoignent de plus en plus ce qui éclaire vraiment notre compréhension. Elles font d’ailleurs la différence entre une crise d’angoisse et une crise autistique. Nous aurons l’occasion de revenir sur cette différence.
Mon élève, André, manifeste et exprime de nombreuses peurs. Par exemple, il a peur de ne pas être le premier de la classe, peur de faire des erreurs sur sa fiche de maths, peur de manquer quelque chose lorsqu’il sort un moment de la classe pour aller aux toilettes par exemple, peur de la sortie scolaire prévue pour la semaine suivante, peur de ne pas pouvoir voir ses grands-parents durant le week-end, etc.
Ses peurs se traduisent du coup souvent par une agitation motrice, un besoin de crier ou lorsqu’il n’arrive plus à se retenir de donner des coups de pied autour de lui.
Dans le quotidien d’une classe, gérer les crises d’angoisse peut s’avérer délicat si les outils de gestion de l’anxiété n’ont pas été mis en place. Ces outils sont souvent élaborés par des psychologues ou neuropsychologues au fait des mécanismes cognitifs sous-jacents à l’anxiété en lien avec la condition autistique. D’où la nécessité de travailler de façon interdisciplinaire entre professionnel.le.s de l’éducation et thérapeutes spécialisés en autisme.
En classe, pour aider Pierre, en plus du travail que peut faire un.e psychologue en cabinet, l’enseignant.e peut s’appuyer sur des outils visuels, comme différentes échelles (émotions, anxiété, excitation, etc.), des scénarios sociaux illustrant la manière dont l’élève peut réagir autrement à telle ou telle autre situation qui le stresse, etc. et évidemment aménager les espaces et le déroulement de la journée de façon la plus explicite possible.
En tant qu’enseignant.e, il est aussi intéressant de préparer un atelier autour des émotions et y aborder ainsi aussi l’anxiété. Et comme notre élève est loin d’être le seul à vivre des émotions fortes, ce travail mené en collectif (avec tous les aménagements utiles pour répondre aux besoins de chacun.e de nos élèves) devient un autre moyen possible pour utiliser les outils préparés en amont par toute une équipe experte. Car c’est peut-être sur ce point précis qu’il y a une réflexion à mener entre professionnel.le.s.
La coopération, c’est-à-dire la co-préparation de la leçon prend tout son sens, car s’il faut travailler sur les émotions en collectif, ce sont les outils (livres, supports visuels, audio, etc..) et les modalités de la leçon qui peuvent faire la différence… En effet, la plupart des enseignant.e.s en milieu ordinaire travaillent sur les émotions, compétence transversale à traiter dans le programme, mais leur leçon parfois est abordée de façon encore trop globale par rapport aux besoins de certain.e.s de nos élèves.
Et c’est à travers le croisement des regards des différents acteurs qui gravitent autour des élèves qu’il est possible de préparer, au final, une leçon qui conviendra à chacun.e.
La difficulté de trouver du temps pour la coopération est un réel problème dans nos écoles aujourd’hui, mais cela concerne un autre registre organisationnel qui va au-delà des compétences des simples acteurs du terrain.
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